13 janvier 2012

Les pharaons libyens

        Origine du nom « berbère 
        Le mot grec « barbaros » désignait celui qui ne parlait pas le grec. Les Grecs appelaient « Barbares » les Romains et les Latins. Le nom latin « barbarus » emprunté au grec, signifiait « étranger à la civilisation gréco-romaine » et s’appliquait à tous les peuples, excepté les Grecs et les Romains. Barbarus a donné l’arabe « barbar », pluriel « beraber », qui a été emprunté par le français. Il désigne aujourd’hui les Berbérophones d’Afrique du nord et, dans un sens plus large, l’ensemble des populations du Maghreb.
Dans l’Antiquité, les Berbères, comme les Espagnols, les Germains, les Gaulois, etc. étaient appelés « barbares ». A l’époque historique, les Grecs les appelaient « Libues » (Libyens), qui vient de l’égyptien Lebu, comme nous allons le voir. Les Latins les nommaient « Afri » (Africains), et faisaient la distinction entre les Maures à l’ouest, les Numides au centre et à l’est, et les Gétules des Hauts- Plateaux.

 Les pharaons libyens
Les Egyptiens eurent très tôt des contacts tantôt pacifiques, tantôt hostiles avec leurs voisins de l’ouest, les Libues. Ils distinguaient en eux plusieurs ethnies, les « Tchéhénou », « Tchéménou », « Libou » et « Mechouech ». Les relations furent pacifiques aussi longtemps que ces peuples se contentèrent de leur territoire, sans menacer l’Egypte.
Dès l’époque archaïque (6000 env. - 3300 avant J.-C.) est attesté le nom des Tchéhénou, qu’on doit situer en Marmarique, à l’ouest du Delta. Jusque vers le milieu du IIème millénaire, ceux-ci n’inquiètent guère le Pharaon. On lance contre eux des expéditions pour ramener du butin et des prisonniers destinés à servir dans les armées. C’est le roi Aha (3125-3100) qui inaugure la longue série des guerres que mèneront ses successeurs contre les Nubiens, leurs voisins du sud, et les Libyens, leurs voisins de l’ouest.
A la VIème dynastie (2460-2200) est attestée la présence des Tchéménou, installés dans le désert libyque à la hauteur de la Nubie.
Vers 1400 apparaissent en Marmarique, à l’ouest du Delta, les Mechouech et les Libou. Attirés par les oasis et surtout le Delta, ils quittent leur territoire, avec campements et troupeaux, pour s’y établir. Ils livrent bétail et graisses comme tribut à Aménophis III (règne env. 1391- env. 1353), qui les cite nominativement parmi les peuples dangereux.
Entre 1294 et 1154, les pharaons Séthy Ier, Ramsès II, Mineptah et Ramsès III menèrent des guerres sans merci pour les refouler. Séthy Ier (1294-1279) eut à combattre les Libyens et les Peuples de la Mer (des pillards venus des îles et des côtes de la Méditerranée), qui tentaient un raid en terre d’Egypte. Mis en déroute, ils reviennent à la charge au temps de Ramsès III.
Sous le règne de Ramsès II, le vice-roi Sétaou mena l’offensive contre les Libyens de Marmarique en 1235. Le même pharaon doit faire face à des incursions libyennes, qui le contraignent à édifier une chaîne de forteresses pour contrôler les déplacements de ces remuants voisins.
Le successeur de Ramsès II, Mineptah, sauva l’Egypte d’un terrible danger : les Peuples de la Mer font irruption dans le Delta oriental tandis que les Libyens attaquent l’Egypte. Les deux armées font leur jonction. Le pharaon les taille en pièces (en 1207). Son fils Ramsès III dut combattre à deux reprises une nouvelle offensive de ces mêmes envahisseurs, dans le Delta occidental. Il remporte la victoire, intègre une partie des troupes ennemies dans l’armée égyptienne (en 1181). Une nouvelle vague déferlera six ans plus tard (en 1175). Ramsès III est de nouveau victorieux, il affecte les prisonniers comme mercenaires dans le Delta et le Fayoum. Entre ces deux guerres, les terribles Peuples de la Mer déferlent comme un raz-de-marée : la Syrie est submergée, l’empire hittite succombe. En Palestine, Ramsès III vainc ces envahisseurs sur terre et sur mer (en 1178). Il n’y aura plus de mention de nouvelles invasions, car les Libyens sont maintenant installés en Egypte.
Après leur défaite, en effet, ils sont emmenés en captivité avec femmes et enfants, et font souche dans le pays. Peu à peu se forment des communautés berbères constituées en partie par leurs descendants, en partie de colons venus plus ou moins pacifiquement par le Delta occidental. Dès le début du Xème siècle, les Libyens et leurs chefs représentent la force réelle, la force militaire dans l’Egypte décadente de la XXIème dynastie. Quand l’Etat sombre dans l’anarchie, leur chef suprême, Chéchonq l’Ancien, s’empare du pouvoir (vers 945). A partir de cette époque, l’Egypte est devenue littéralement libyenne : des gouverneurs libyens résident dans toutes les villes, même les grands prêtres de Thèbes et de Memphis sont libyens.
Chéchonq l’Ancien acquiert assez de puissance pour que l’un de ses fils devienne pharaon. Une quarantaine d’années plus tard, son petit-fils succéda à Psousennès II, fondant la XXIIème dynastie dite chéchonquide. Deux siècles durant, les Libyens donnèrent à l’Egypte ses rois et les grands prêtres d’Amon. Pendant quelques générations, le pays retrouva une puissance bien oubliée depuis Ramsès III avant d’être livré à « l’anarchie libyenne », qui dura une grande partie du VIIIème siècle. Vers 750, on dénombre quatre dynasties sans compter de nombreuses principautés libyennes. Les luttes pour le pouvoir aboutissent au triomphe d’un roi de Kouch (Nubie), Piankhy, qui conquiert l’Egypte en 730.
Bibliographie
N. Grimal, Histoire de l’Egypte ancienne, Paris, Fayard, 1988.
P.Vernus et J. Yoyotte, Dictionnaire des Pharaons, pp. 44, 89, 90, Paris, éd. Noésis, mai 1998.
A. Herman et H. Ranke, La civilisation égyptienne, Paris, Payot, 1983.

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